Des oreilles qui ne peuvent plus en prendre

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Par Jean-Christophe Noël ; Le 20 octobre 2020 à 12 h 00 min

Alors que les psychologues ne sont plus en mesure de recevoir de nouveaux clients, la COVID-19 continue d’augmenter le besoin éprouvé par la population envers ce type de consultation professionnelle.

« Le nombre de demandes a augmenté au cours du dernier mois. Nous observons une recrudescence. Présentement, tous nos professionnels ont une liste d’attente. Nous en sommes même au point où nous ne prenons plus personne sur nos listes d’attente. C’est au minimum trois mois d’attente », établit d’emblée Véronique Hugron, psychologue et cofondatrice de la Clinique Psychocentre Chambly, qui abrite en son sein 14 professionnels.

Parallèlement au privé, le réseau public ne fournit pas non plus à la demande. De son côté, Anne-Marie La Barre, thérapeute en relation d’aide à Chambly, se dit « inquiète du fait que l’attente pour voir un psychologue est de 6 à 24 mois dans le réseau public québécois. J’ai des gens qui m’appellent pour me dire que même au privé, ils ont de la difficulté à trouver de l’aide psychologique ».

D’autres professionnels peuvent accompagner des gens en souffrance. La loi 28 au Québec fait la distinction entre ce qui est réservé aux psychothérapeutes (médecins, psychologues et membres de certains ordres professionnels) et ce qui est permis à d’autres professionnels.

« Par exemple, je ne peux faire de diagnostics, je ne peux traiter les troubles de la personnalité ni les troubles de l’humeur. Comme thérapeute en relation d’aide, je peux accompagner un adulte qui vit des difficultés relationnelles avec les autres (couple, travail, famille) ou avec lui-même (estime de soi, période de vie difficile, deuil…) », nuance Mme La Barre.

Dans le but d’aiguiller et de raffiner l’information quant aux ressources possibles, Mme La Barre complète en disant « qu’à part mon domaine, il y a d’autres spécialités qui peuvent donner un coup de main, une qualité d’écoute et un accompagnement professionnel : thérapeutes spécialisés en gestion des émotions, thérapeutes en relations humaines et autres. Il existe de ces spécialistes dans notre région ».

« Nous en sommes même au point où nous ne prenons plus personne sur nos listes d’attente. » – Véronique Hugron

Santé mentale générale

Après une première vague dont plusieurs ne se sont pas remis, une deuxième qui s’ensuit laisse déjà des traces.

« Nous voyons beaucoup plus d’anxiété pouvant être liée à la perte d’un emploi, à l’insécurité financière qui en découle, aux difficultés dans le couple, à la fatigue, etc. La fatigue peut être causée par le manque de stimulation entraîné par l’isolement, ou inversement, par la promiscuité pouvant être irritante », dépeint globalement Mme Hugron.

La codirectrice du Psychocentre Chambly note une différence entre la première et la seconde vague. « Pour les gens fatigués, la première vague a permis une forme de repos. Certains étaient en épuisement ou démontraient même des symptômes de dépression mais continuaient de travailler. Ils ont eu la ‘’chance’’ d’avoir un répit permettant de travailler sur leur mieux-être. » Les gens ne verraient toutefois pas cette deuxième pause forcée du même œil. Parmi les inquiétudes que soulève la psychologue, le temps des Fêtes et l’appréhension quant à sa préparation troublent la paix d’esprit. Un temps des Fêtes sans contact avec ses proches mérite-t-il le nom de ‘’temps des Fêtes’’?

Société abîmée

Une société plongée dans l’incertitude et ne bénéficiant pas d’outils pour s’accompagner ni se soigner risque-t-elle de s’abîmer à long terme?

« Les enjeux à long terme peuvent être de l’ordre du décrochage scolaire ou de ruptures familiales. C’est difficile d’en évaluer les répercussions avant quelques années. On demande aux gens de s’adapter et de revenir à leurs ressources intérieures. Il n’y a plus d’esquives extérieures comme aller au cinéma ou au restaurant. Il faut apprendre à s’occuper de soi, car le stress est énorme », projette la spécialiste.

Bien que ce soit variable, un psychologue peut offrir en moyenne une vingtaine de consultations par semaine. Hebdomadairement, Mme Hugron peut recevoir une quinzaine d’appels de nouveaux clients potentiels.

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