Ce n’est pas le moment de faire la fine bouche - Mathieu Bock-Côté

Mathieu Bock-Côté Mercredi, 17 mars 2021 05:00 - La polémique entourant le vaccin AstraZeneca pourrait bien faire déraper pour un temps la stratégie vaccinale de plusieurs pays.

https://www.journaldequebec.com/2021/03/17/ce-nest-pas-le-moment-de-faire-la-fine-bouche

D’ailleurs, ils sont nombreux à avoir suspendu pour quelques jours son utilisation.

Dès lors, les craintes populaires surgissent : ce vaccin serait-il dangereux ? Les cas problématiques rapportés sont-ils significatifs ou anecdotiques ? 

La confusion s’aggrave quand on voit d’autres pays réaffirmer qu’ils lui font confiance. 

Qui croire ? Les dirigeants jouent-ils à la roulette russe avec la santé des populations ?

Politique

On comprend une chose : au cœur de la pandémie, il arrive que les exigences de la politique et celles de la science se contredisent, et même s’affrontent. 

La première a une responsabilité immense : mener une opération de vaccination d’envergure historique, à grande échelle et rapidement, pour libérer nos sociétés de la caserne du confinement et de la peur de la COVID-19. 

Elle doit gérer l’inquiétude d’une population qui souhaite globalement le vaccin, mais s’inquiète de la rapidité de son développement. Plus encore : on lui présente plusieurs vaccins, en lui expliquant que certains sont meilleurs que d’autres, mais qu’elle n’a pas le droit de choisir. 

La seconde doit produire des vaccins efficaces, tout en sachant qu’en la matière, le risque zéro n’existe probablement pas. 

Surtout, elle peut accepter une marge de risque qui lui semble raisonnable, mais que certains segments de la population jugeront exagérée. 

À travers tout cela, il y a un effet domino : dès lors qu’un pays cesse d’administrer un vaccin, même s’il le fait pour de mauvaises raisons, il impose une pression immense pour les autres, dès lors accusés, s’ils n’emboîtent pas le pas, de risquer la santé de la population, ou du moins, des plus vulnérables. 

À travers cela, la moindre information inquiétante peut emballer le système médiatique mondial et pousser chaque pays à réagir en fonction de la vague qu’elle crée. 

La politique, aujourd’hui, consiste souvent à prendre ses décisions non pas en fonction de la réalité, mais en fonction du traitement de l’information qu’on trouve dans les journaux, à la télévision, à la radio et sur les médias sociaux. 

Il ne faut pas négliger la dimension psychologique de cette controverse. Depuis un an, le citoyen lambda se sent à bon droit dépossédé de sa propre existence. Il doit se terrer chez lui et n’en plus sortir. 

Démocratie

La vaccination arrive, et on lui explique que plusieurs vaccins sont présents sur le marché. Une manière pour lui de retrouver une souveraineté minimale sur sa propre vie consiste à dire qu’il acceptera tel vaccin, mais pas tel autre. C’est un réflexe naturel. On ne saurait l’en blâmer. Il y a des limites à exiger une docilité absolue de la population. 

Et pourtant, si chacun fait la fine bouche, c’est la possibilité de sortir de la pandémie qui est compromise. Il ne faudrait pas que le principe de précaution devienne paralysant. La vaccination massive demeure essentielle.

Derrière la crise vaccinale, on retrouve tous les éléments de ce qu’il faut bien appeler une crise démocratique.

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