C’était il y a 40 ans exactement, le 4 novembre 1981. Un an et demi plus tôt, le 20 mai 1980, les Québécois avaient
voté Non au référendum du gouvernement Lévesque sur la souveraineté-association.
Ils avaient voté Non, car Pierre Elliot Trudeau leur avait promis d’immenses changements constitutionnels s’ils restaient dans la fédération.
Trudeau
Ils avaient aussi voté Non, avouons-le, car la campagne de peur des fédéralistes, présentant l’indépendance comme une catastrophe économique, avait apeuré un peuple habitué à se faire dire depuis deux siècles que laissé à lui-même, il serait incapable et médiocre.
Il ne s’agit pas de revenir sur le détail de ces événements, mais de se rappeler que ce passé façonne encore notre présent.
Voici pourquoi.
Trudeau avait promis que si les Québécois votaient Non, il les reconnaîtrait comme un des deux peuples fondateurs du Canada. Ils disposeraient d’un statut particulier pour défendre leur identité.
Mais de fourbe manière, il avait l’intention de faire le contraire.
Et nous y venons : le 4 novembre au soir, pendant la nuit, en fait, sous la gouverne d’un Jean Chrétien retourné contre son propre peuple, les premiers ministres du Canada anglais se sont rassemblés entre eux pour décider d’une nouvelle constitution pour le Canada, alors que René Lévesque dormait de l’autre côté de la rivière des Outaouais.
Fondamentalement, le Canada anglais décidait seul de la nouvelle constitution du Canada, qui réduisait les pouvoirs du Québec en matière linguistique et créait les bases d’un nouveau modèle de société, fondé sur le gouvernement des juges et le multiculturalisme.
Dans ce nouveau Canada, le peuple québécois n’était plus un peuple fondateur, mais un groupe ethnique parmi d’autres et le Québec, une province sur dix.
Nous avos d’abord résisté à cette nouvelle constitution, que le Québec a d’ailleurs refusé de signer, au moment de sa proclamation en 1982. Nous ne l’avons toujours pas signé, d’ailleurs.
Les Québécois, globalement, s’opposent encore aujourd’hui à la vision du monde portée par cette constitution. Mais leurs élites ont été trudeauisées. Quarante ans plus tard, la constitution de 1982 n’en finit plus de faire sentir ses effets.
C’est elle ui fragilise et handicape tout à la fois notre laïcité et qui nous empêche d’agir vraiment pour le français.
Chrétien
Un dernier mot : on a vu Jean Chrétien revenir hanter l’actualité, récemment. Avec son air pittoresque de conteur de taverne, avec ses farces et attrapes, il inspire même une certaine sympathie à ceux qui ne l’ont pas connu.
Cet homme a pourtant été déloyal à son peuple avant de violer les règles de la démocratie québécoise lors du référendum en 1995 et de faire voter plus tard la loi C-20 entravant notre droit à l’autodétermination ensuite.
J’y reviens : sans l’histoire, le présent est incompréhensible. Avec elle, nous comprenons mieux les sources de notre impuissance actuelle. On a beau ne pas s’occuper de la constitution, elle s’occupe de nous.