«Docs émissaires», renforts nécessaires - Antoine Robitaille

Antoine Robitaille Antoine Robitaille Jeudi, 16 avril 2020 05:00

Casser du sucre sur le dos des médecins spécialistes est courant au Québec, et François Legault en profite.

C’est de bonne guerre, vous me direz.

Imposer une corvée dans les CHSLD aux « millionnaires » de la médecine, les forcer à faire le boulot des infirmières et des préposés aux bénéficiaires qu’ils regardent de haut, ça ne peut que satisfaire l’opinion publique majoritaire ; tout en répondant à une urgence bien réelle.

Des 13 h sombres

Il y a là une sorte de coup de poker du premier ministre.

Depuis samedi, où il renonça à son congé, son rendez-vous de 13 h a revêtu un caractère grave. Le gouvernement se retrouve, pour la première fois depuis le début de la crise, sur la défensive. Le doc Arruda a même un je-ne-sais-quoi d’empesé.

Évidemment, l’inacceptable s’est produit dans certaines résidences.

On a négligé ces lieux où les plus vulnérables de notre société se retrouvent.

Or, notre Bureau d’enquête rappelait hier un rapport daté de 2006, rédigé dans la foulée de l’épidémie du SRAS, où l’on avait pointé ces lieux comme le maillon faible en cas de pandémie. Rapport qu’on tarda à appliquer en 2020.

Faute partagée

Malgré ces avertissements, les vieux sont le principal angle mort dans la crise actuelle.

À qui la faute ?

Sans doute au gouvernement Legault, mais pas uniquement, surtout qu’il tente sincèrement de renverser la vapeur depuis samedi.

La grande part de responsabilité revient évidemment à certains propriétaires douteux comme la famille Chowieri. Les gestionnaires des CIUSS aussi, qui leur accordent des permis, auraient dû se montrer plus vigilants.

N’oublions pas le gouvernement Couillard, qui a, avec sa rigueur budgétaire excessive, fragilisé ces milieux. Il tarda aussi à prendre en compte le problème des ratios personnel-patients, ne s’y attaquant qu’en fin de mandat.

Ce même gouvernement, dans lequel les médecins spécialistes (Barrette, Bolduc, Iglesias) avaient le haut du pavé —on parla de médicalocratie—, haussa la rémunération de leurs collègues. Ces derniers étant désormais, selon des analystes, mieux payés qu’en Ontario. Sans compter qu’à l’ère Charest, en 2007, on leur déjà avait permis de s’incorporer, malgré leur client unique, la RAMQ.

François Legault fit campagne, en 2018, en promettant de piger, dans leurs poches, 1 milliard de $ payés en trop. Arrivé au pouvoir, la négociation s’avéra plus ardue que prévu, mais une entente (absconse) fut signée en décembre.

Cri du cœur

L’urgence sanitaire dans les CHSLD exigeait le cri du cœur d’hier. Le premier ministre se mit stratégiquement à genoux devant ces professionnels jadis traités comme des dieux, mais depuis tombés de leur piédestal.

À ce fort appel du devoir, les médecins n’eurent d’autre choix que de répondre. Au premier chef les alliés d’hier devenus ennemis : le prolixe Gaétan Barrette et la tranchante Diane Francoeur.

C’est de bonne guerre de la part de celui avec qui ils ferraillèrent, François Legault, en cette crise sans précédent. Celle-ci passée, il faudra toutefois se souvenir que le problème des « maisons de vieux » n’est certainement pas la seule faute de notre aristocratie médicale.

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