Mario Dumont Mercredi, 22 avril 2020 05:00 - Comment s’expliquer la tragédie qui frappe nos aînés ? Il faut bien qu’une société ait investi autant d’efforts pour offrir la possibilité de
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« Mourir dans la dignité » pour voir autant de ses aînés vivre l’exact contraire.
Le cas des milieux en crise comme la résidence Herron sont les plus extrêmes. Là, comme dans plusieurs autres CHSLD, des hommes et des femmes âgés ont vécu une fin de vie difficilement concevable. L’arrivée de la COVID-19 ayant forcé une partie importante du personnel à se mettre en quarantaine, des centres se sont retrouvés en bas du minimum.
Comment se fait-il que tant de nos aînés meurent dans l’indignité ? D’abord, il faut bien reconnaître que notre système n’aura pas réussi à les protéger. Nos experts en santé publique avaient planifié soigneusement le confinement de la société et la préparation du système hospitalier. Mais pas les résidences pour aînés. Ces milieux déjà fragiles ont été rapidement terrassés par le virus.
Soins déficients
Dans les centres dépassés par les événements, on a vu des aînés décéder dans une période où plus rien ne semblait garanti. Le niveau de soins est en forte baisse. Au point de ne plus être capables de répondre à des besoins aussi fondamentaux que la soif et la faim. Au point de devoir repousser le moment du changement de la culotte d’incontinence. On ne parle même plus des autres soins d’hygiène normale.
Mourir sale et mourir seul. C’est quand même le triste du triste. En cette période où les visites dans les résidences pour aînés sont interdites, le contact avec les familles fait aussi défaut. Certains ont su à la dernière minute toutes les nouvelles : leur proche était atteint de la COVID-19 et... il lui restait quelques heures à vivre. Conséquence : certaines fins de vie ont eu lieu dans une pathétique solitude.
C’est toute la promesse de la commission Mourir dans la dignité qui semble s’évaporer dans plusieurs cas de décès provoqués par la pandémie. La possibilité de ne pas décéder dans la souffrance et de vivre ses dernières heures en étant entouré de ses proches, tout cela nous glisse entre les doigts.
Mourir seul
Le gouvernement a bien fait une exception pour les visites aux gens en fin de vie. La situation de crise qui règne dans plusieurs établissements restreint les possibilités à un strict minimum. Pourrions-nous faire mieux ? Je serais curieux d’entendre les spécialistes des soins palliatifs.
Pour rendre le deuil encore plus difficile pour l’entourage des défunts, la récupération des corps et les autres étapes du processus funéraire habituel sont bouleversées. Étant donné l’interdiction de rassemblements, il n’est pas possible d’organiser des funérailles. Il n’est même pas légal pour les enfants d’un aîné décédé de se réunir pour pleurer ensemble et se consoler les uns les autres.
Interrogée sur la mort de son père par un collègue de TVA Nouvelles, une femme désabusée et résignée a eu cette réflexion : « Il va faire partie des statistiques de la COVID-19. »