Mario Dumont Samedi, 9 mai 2020 05:00 - Les régions veulent rester fermées pour se protéger des gens de la zone rouge montréalaise. Ont-ils raison ?
https://www.journaldemontreal.com/2020/05/09/les-voyages-du-virus
Plus on en sait sur le rôle des retours de voyage dans l’incursion de la COVID-19 chez nous, plus on regrette le laxisme du début mars. Nous en payons un prix inimaginable.
Les frontières du Canada auraient dû être fermées plus rapidement. Les voyages en provenance de la Chine auraient dû être placés sous un contrôle strict dès l’apparition de la crise à Wuhan.
Mais surtout, la quarantaine pour les gens de retour de voyage a manqué dramatiquement de sérieux. On a beau parler de fermeture des frontières, on n’empêchera jamais les Canadiens de rentrer à la maison. Pour ceux-là, nous avons badiné et tatillonné à imposer la quarantaine avec fermeté.
Pendant des jours, des milliers de voyageurs rentraient d’Europe, d’Asie ou des États-Unis sans qu’on leur fasse sentir, à l’aéroport, la gravité de la situation. Au début, on ne leur mentionnait rien. Puis on leur donnait un vague dépliant leur suggérant de surveiller leurs symptômes.
Dès que nous avons saisi la gravité, les voyageurs auraient dû être pris à part à l’aéroport. Se voir remettre des documents explicatifs, recevoir des mises en garde officielles et signer un engagement de RENTRER À LA MAISON pour 14 jours. Sans passer par la banque, l’épicerie ou chez son beau-frère.
Une véritable quarantaine aurait limité la propagation qui nous coûte si cher aujourd’hui en vies humaines et en démolition économique. Nous pouvons retenir cela comme leçon pour l’avenir.
Leçon
Nous pourrions aussi retenir cela comme leçon pour le présent. Le virus ne voyage pas seul. Il voyage sur des humains. Le Canada et le Québec l’ont importé via des voyageurs.
C’est exactement le raisonnement que mettent de l’avant ceux qui militent contre la réouverture immédiate de leurs régions. Les pétitions qui circulent en ce sens obtiennent un impressionnant succès. De l’Abitibi jusque dans l’Est-du-Québec, des gens trouvent que le gouvernement fait fausse route.
Je me demande encore d’ailleurs d’où venait l’urgence. Pour l’école, on comprend les besoins des enfants. Pour le commerce, on comprend la nécessité de remettre l’économie en marche et d’éviter des faillites. Dans le cas des régions, bien peu d’élus ou de citoyens réclamaient cette ouverture.
Quasiment aucun cas
Dans la plupart de ces régions, il n’y a presque plus de cas de
COVID-19, sinon plus du tout, depuis deux ou trois semaines. Peut-on leur reprocher d’appliquer exactement le raisonnement que nous avons retenu à propos des gens de retour de voyage ? On ne veut pas prendre le risque que des gens arrivant de territoires où la maladie circule la traînent avec eux.
Avec l’arrivée de l’été, la pression s’accentuera dans ces régions pour laisser une chance à l’industrie touristique locale. En espérant que l’état de la pandémie dans l’ensemble du Québec le permettra. Mais aujourd’hui, à la mi-mai, rien ne presse.
Il serait bien logique de repousser cette ouverture de quelques semaines, le temps notamment de voir un peu mieux comment la situation évolue dans la région de Montréal.