Mario Dumont Vendredi, 8 mai 2020 05:00 - Le gouvernement canadien doit-il faire un budget ? Justin Trudeau a laissé entendre qu’il n’en déposerait pas.
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Le budget est un exercice de prévisions. La situation de cette année étant trop imprévisible, l’exercice deviendrait inutile, selon lui.
Généralement, l’exercice se fait fin février début mars.
Cette année, le ministre Morneau l’avait repoussé un peu, puis nous nous sommes retrouvés au cœur d’une crise.
Dans le dernier mois, le premier ministre a annoncé des mesures budgétaires d’une amplitude jamais vue, mais l’a fait lors de ses conférences de presse quotidiennes.
Du point de vue légal, les mesures complètement nouvelles, comme la PCU, ont pris leur assise juridique dans les lois adoptées en urgence au Parlement.
Du point de vue strictement légal, on pourrait donc dire qu’un budget n’est pas obligatoire.
Mais...
Le minimum
Les partis d’opposition réclament au minimum une mise à jour économique, une sorte de version allégée d’un budget.
Je dirais que c’est le minimum. L’exercice du budget n’est pas futile, même si les prévisions qu’il contient peuvent devenir caduques après quelques mois, en période de turbulences.
Monsieur Trudeau soutient qu’il a fait preuve d’une totale transparence en divulguant quotidiennement toutes ses mesures et en stipulant le coût de chacune. C’est vrai, mais cela n’a rien à voir avec un budget. Déballer une longue liste de ses dépenses, ce n’est pas l’équivalent de faire un budget.
L’exercice du budget met ensemble les revenus et les dépenses. On y traite du financement de la dette, de la stratégie économique et de l’interaction entre les mesures par exemple.
La PCU et la subvention salariale sont des vases communicants. Où en est-on ? Les contribuables qui reçoivent ces aides en retourneront une partie via leur impôt, pour ceux qui gagnent assez. Combien estime-t-on ?
Dépenser, dépenser
Faire un budget, c’est la différence entre dépenser sans compter et avoir une sorte de plan, même si l’on navigue dans la tempête.
Un budget fournit aussi au gouvernement un cadre pour les décisions futures. Elles viendront vite ces décisions difficiles.
En juin prochain, faut-il allonger quelques milliards de plus pour prolonger la subvention salariale pour les entreprises qui n’auront pas repris leurs activités ?
En juillet, le gouvernement Trudeau devra statuer sur la PCU. Ajouter des mois ou retourner les millions de personnes toujours sans travail sur l’assurance-emploi régulière ?
Ces décisions doivent être prises en tenant compte des besoins exprimés, mais aussi en fonction de la capacité de payer de l’État.
Normalement, le budget fournit au gouvernement un encadrement pour tracer la ligne parmi toutes les dépenses possibles.
Présentement, on aurait plutôt l’impression que monsieur Trudeau dépense frénétiquement et jouit de l’annoncer lors de ses points de presse.
L’urgence de la situation en justifie une bonne partie, mais quand même. Est-ce que quelqu’un tient encore le compte sur sa calculatrice quelque part ?
En l’absence d’un budget, on nous demande un total acte de foi envers Justin Trudeau. Et la gestion rigoureuse des finances n’est pas sa spécialité.