Mathieu Bock-Côté Mercredi, 18 mars 2020 05:00 - Au fil des dernières décennies, le monde occidental s’était ramolli. Il goûtait la douceur des temps de paix, sous le signe de la démocratie apaisée et de la prospérité garantie.
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La condition des plus démunis demeurait évidemment condamnable, mais à l’échelle de l’histoire, elle s’était significativement améliorée. La conscience collective s’était laissé pénétrer d’une certitude, associée à l’idéologie du progrès : tout ira toujours en s’améliorant.
Nous avions oublié que l’histoire est tragique et que de mille manières, elle rappelle à l’homme ses limites, sa fragilité, sa mortalité.
Le tragique oblige à revenir à des vertus élémentaires sans lesquelles l’espèce humaine ne saurait survivre.
Survivance
Dans ces circonstances, les Québécois sont admirables et font preuve d’une vraie solidarité, comme si la mémoire des siècles et des réflexes de survie qu’on y avait développés remontait à la surface.
Ne l’oublions jamais, depuis les premiers jours de la Nouvelle-France au XVIIe siècle jusqu’à la deuxième moitié du XXe siècle, notre peuple a vécu en situation de précarité structurelle.
Il y avait quelque chose d’un peu fou à fonder ici un pays en 1608. Nous y sommes parvenus.
Il y avait un pari improbable dans notre résistance tranquille face à l’envahisseur anglais en 1760 et au Traité de Paris de 1763. C’est en serrant les coudes que nous y sommes parvenus.
Après 1840, alors que nous subissions à nouveau la dure défaite des armes, nous avons parié sur la survivance. Ce fut pénible. Mais en nous cramponnant à nos traditions, nous avons traversé une autre époque pénible.
En 1960, nous étions prêts pour la Révolution tranquille.
Et en 2020, avec nos grandeurs et nos misères, nous sommes toujours là.
Le peuple québécois est beau à voir lorsqu’il fait preuve de solidarité.
Quand le premier ministre demande aux retraités de la santé de se mobiliser pour soutenir notre système, ils viennent en masse.
Quand il invite les Québécois à donner du sang pour éviter que nos banques en manquent, ils sont aussi au rendez-vous.
Partout surgissent des initiatives de solidarité.
Nous sommes doués pour survivre et nous lancer dans les grandes corvées nécessaires pour reconstruire notre société, comme autrefois on reconstruisait nos villages.
Évidemment, comme partout ailleurs, certains déraperont pendant la crise. Nous ne sommes pas immunisés contre l’irrationalité et la bêtise humaine. Mais globalement, il y a de quoi se sentir fiers d’être Québécois.
Legault
Un symbole fort émerge dans la crise à travers François Legault : celui du bon père de famille. Notre époque a tendance à le maudire ou le ridiculiser, comme s’il s’agissait désormais d’une figure optionnelle ou régressive. Le père serait réactionnaire !
On le redécouvre dans ce qu’il a de mieux : calme, rassurant, juste, doté d’une autorité naturelle, et tenant la barre dans une situation houleuse.
Un peuple a besoin d’être gouverné, non par une main de fer, mais par une main ferme.
Nous vivons une page importante de notre histoire et nous serons à la hauteur. Pour peu que les incompétents d’Ottawa cessent enfin de nous nuire !