Mathieu Bock-Côté Mercredi, 16 septembre 2020 05:00 - Ils étaient 10 000 dans les rues dimanche, à Montréal,
pour protester contre ce qu’ils croient être des mesures sanitaires exagérément contraignantes.
https://www.journaldemontreal.com/2020/09/16/tous-des-epais
Il y a beaucoup de coucous chez leurs leaders, qui tiennent souvent des discours hallucinés. Plusieurs militants font preuve aussi d’une grande agressivité, comme on le voit sur les médias sociaux. Ils sont nombreux à acheter la première théorie conspirationniste disponible : la moindre loufoquerie trouve toujours preneur sur le marché des idées dingues. QAnon n’est pas la moindre.
Révolte
Cela dit, il faut résister à la tentation de considérer tous ceux qui ont des réserves sur la présente gestion de la pandémie comme des épais.
À ce qu’on sait, les responsables de la santé publique n’ont pas fait un sans-faute dans la gestion de la pandémie. Au nom de la science, Ottawa refusait de fermer les frontières, avant de les fermer, toujours au nom de la science. De même, on a découragé le port du masque avant de le rendre obligatoire, encore au nom de la science.
Je ne blâme pas nos gouvernements pour ces hésitations. La situation est inédite. Personne ne savait vraiment comment réagir devant la pandémie. Nos gouvernements ont fait comme ils ont pu, au mieux des connaissances disponibles. Ils le font encore, d’ailleurs.
Mais cela nous rappelle que les autorités ne disposent pas d’un savoir absolu. Elles peuvent déraper.
Dans le scepticisme à l’endroit du masque, il faut voir non seulement une pathologie conspirationniste, mais aussi un contre-pouvoir populaire et une réaction contre la tentation d’une vie aseptisée.
Voulons-nous vraiment vivre sous une cloche de verre ? Voulons-nous d’une société où la surveillance et la délation de son voisin s’imposent comme des gestes recommandés moralement ? Est-il normal de ne pouvoir organiser de cérémonies funéraires pour nos proches décédés ?
Quand certains demandent la fermeture immédiate des bars et même des restaurants pour créer l’environnement sanitaire le plus sécuritaire, ils cèdent au fantasme du contrôle social total. On ne saurait confondre la vigilance et la psychose. Assurément, il faut pénaliser très sévèrement les établissements qui ne respectent pas les règles. Mais on ne saurait pénaliser ceux qui respectent les règles pour une minorité d’irresponsables.
Coucous ?
Le commun des mortels, généralement, ne demande pas grand-chose. Il est prêt à bien des sacrifices en période de crise. Il n’est pas imbécile. Ce virus est réel. Cette pandémie n’est pas fictive. Mais le commun des mortels demande de la mesure.
Je peine à croire que les manifestants dimanche étaient tous des fous furieux. Ils expriment une détresse à laquelle on ne saurait répondre par le mépris. Il faut les intégrer dans le débat public. D’ailleurs, je n’ai pas souvenir d’une extrême sévérité des autorités devant les manifestations « antiracistes » de juin. Ceux qui y participèrent projetaient-ils moins de gouttelettes ? Une personne n’est pas moins contagieuse parce qu’elle plaît idéologiquement à Radio-Canada.
J’espère toutefois que ceux qui critiquent la gestion de la pandémie sauront enfin se démarquer des agitateurs et démagogues qui cherchent à les embrigader dans une révolte extrémiste.