REM L’argent des contribuables finance la «rentabilité» du train de la Caisse - Michel Girard

L’ancien grand patron de la Caisse Michael Sabia et l’ex-premier ministre Philippe Couillard ont été les grands architectes du montage financier préalable à la construction du REM.

Michel Girard Jeudi, 24 décembre 2020 05:00

https://www.journaldemontreal.com/2020/12/24/largent-des-contribuables-finance-la-rentabilite-du-train-de-la-caisse

Après un premier REM de 8 milliards de dollars qui va notamment relier l’aéroport au centre-ville de Montréal, CDPQ Infra en projette un second de 10 milliards $ pour l’est de Montréal.

Et comme c’était le cas pour le premier REM, la Caisse de dépôt et placement estime que la viabilité du deuxième projet de REM de sa filiale CDPQ Infra va lui permettre de « générer les rendements nécessaires pour répondre aux attentes de ses déposants, tout en contribuant pleinement à soutenir la relance économique du Québec » dans les années à venir.

Parole de Charles Emond, PDG de la Caisse : « Nous avons là un investissement durable qui contribuera à la retraite des Québécois(es) et générera des bénéfices importants pour l’économie, l’environnement et les communautés. C’est ce que nous appelons à la Caisse du capital constructif permettant d’allier performance et progrès. »

Que le gouvernement de François Legault donne son aval à un nouveau REM de l’est de Montréal, c’est aussi défendable que le lancement du premier Réseau express métropolitain sous l’ancien gouvernement de Philippe Couillard.

La question à plusieurs millions

Mais pourquoi confier à la Caisse de dépôt et placement le développement de ces deux projets montréalais de transport collectif ?

Le rôle premier de la Caisse de dépôt et placement, c’est de faire fructifier l’argent que lui confient ses déposants, notamment le gouvernement du Québec, les régimes publics de retraite de ses employés, la Régie des rentes du Québec, etc.  

Disposant d’un actif net de quelque 330 milliards de dollars, la Caisse est un investisseur et gestionnaire de portefeuille de calibre mondial.

Ce n’est pas son rôle de jouer aux opérateurs de transport collectif comme elle entend le faire avec sa filiale CDPQ Infra.

On va me dire qu’avec ses projets de transport collectif la Caisse de dépôt entend rapporter un rendement annuel de l’ordre de 8 % sur ses investissements.

Prenons pour exemple son investissement initial de 3 milliards de dollars dans le premier REM qui est en cours de construction. 

Lorsqu’il sera pleinement opérationnel, vers 2027, la Caisse devrait encaisser annuellement un gain net de 240 millions de dollars.

Le problème avec la « rentabilité » du REM, c’est qu’elle va provenir en grande partie des subventions que le gouvernement du Québec va devoir verser à titre de contribution annuelle à l’achalandage du REM.

La facturation

Contrairement à ce que bien des gens pensent, le REM de la Caisse, une fois en service, ne va aucunement s’autofinancer avec les usagers.

C’est l’ARTM (Autorité régionale de transport métropolitain) qui est responsable de payer la facture du REM.

Dans le prix (initial) que le REM entend facturer à l’ARTM pour l’achalandage, soit 72 cents le passager/kilomètre, les usagers vont débourser 21 cents, soit 29 % de la facture de la randonnée en REM.

Pour leur part, les municipalités desservies par le REM paieront autour de 16 % de la facture (11,4 cents le passager/kilomètre).

Et le gouvernement du Québec, lui, couvrira le reste, soit 55 % de la facture (39,6 cents, le passager/kilomètre).

Concrètement

Pour voir concrètement ce que la tarification du Réseau express métropolitain va rapporter, je vous invite à jeter un coup d’œil au tableau ci-contre.

En se basant sur les prévisions d’achalandage du REM qui ont été élaborées pour l’année de référence 2027, l’expert en transport collectif Réjean Benoit a calculé que le gouvernement du Québec verserait pour l’utilisation du REM un montant de 238 millions de dollars cette année-là.

Coïncidence : vous remarquerez que ce montant de 238 millions de dollars de subvention provinciale correspond aux 240 millions de dollars de rendement annuel que la Caisse projette d’encaisser sur son investissement de 3 milliards de dollars dans le premier projet de REM.

Avec son deuxième projet de REM de l’est de Montréal, il faut s’attendre au même scénario de « rentabilité ».

Pourquoi ce cadeau de Québec ?

Compte tenu du fait que la Caisse est en soi une créature du gouvernement du Québec, pourquoi Québec lui verserait-il 8 % de rendement sur l’argent investi dans le REM qui provient des propres goussets du gouvernement, de ses employés et des contribuables ?

Ne vaudrait-il pas mieux que la filiale CDPQ Infra soit plutôt intégrée à l’ARTM et ainsi économiser les 240 millions de dollars de profits que la Caisse projette de réaliser sur le dos du gouvernement avec le REM ?  

ANNÉE DE RÉFÉRENCE 2027 DU REM

  • Nombre de passagers/kilomètres attendus : 608,8 millions.
  • Facture totale de l’achalandage : 438,3 millions $.

Partage de la facture :

a) Usagers (127,8 millions $) ;

b) Municipalités (72,1 millions $) ;

c) Gouvernement du Québec (238,4 millions $).

Source : Réjean Benoit, expert en transport collectif

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