Richard Mardtineau - Je ne connaissais pas Karim Ouellet. Je ne l’ai jamais rencontré et, pour être franc, passant plus de temps à lire et à regarder des films qu’à écouter de la musique, je ne connais pas beaucoup son œuvre.
Mais sa disparition me bouleverse.
TOUT LE MONDE PLEURE
Comme vous, je me demande combien il y a de Karim Ouellet, actuellement.
Combien de gens fragiles, fragilisés encore plus par cette maudite pandémie.
On aurait tous le goût de leur chanter cette magnifique ode à l’amitié des Cowboys fringants :
« Mets ta tête sur mon épaule
Pour que mon amour te frôle
Toi qui en as tant besoin
Ce soir, je l’ai vu
Le mouchoir de larmes dans ta poche
J’aime pas ça savoir que tu
Tiens avec d’la broche »
Ou encore cette chanson de R.E.M. :
« When your day is long
And the night, the night is yours alone
When you’re sure you’ve had enough
Of this life, well hang on
Don’t let yourself go
‘Cause everybody cries
Everybody hurts sometimes »
VIVRE À DISTANCE
Combien de commerçants qui regardent avec angoisse leurs économies s’évaporer ?
Combien de personnes âgées isolées dans leur petit appartement ?
Combien de jeunes qui, alors qu’ils devraient s’éclater dans des bars, vivent ce qui devrait représenter les plus belles années de leur vie scotchés à un écran ?
Combien de malades séparés des leurs ?
Combien de gens seuls encore plus seuls ?
On peut travailler et s’éduquer à distance, c’est possible.
Mais on ne peut aimer à distance.
Expérimenter à distance.
Se réchauffer l’âme à distance.
Consoler et se faire consoler à distance.
L’être humain n’est pas fait pour ça.
S’il y a quelque chose qu’on a appris, au cours de cette crise, c’est que le sens le plus important est celui auquel on pensait le moins.
Le toucher.
Une main sur l’épaule. Une accolade. Un câlin.
Frôler, caresser, prendre à bras le corps.
Danser. Se bousculer. Se noyer dans une foule, se perdre dans un océan de bras, de têtes et de jambes, comme on devrait le faire quand on a vingt ans.
S’OUVRIR
À mon âge, rester chez moi n’est pas une punition. Plus on vieillit, plus on a tendance à se refermer.
Mais quand tu es jeune, c’est le contraire.
Tu t’ouvres comme une fleur, tu éclos, tu écarquilles tes yeux et ton cœur, tu cherches ta vie ailleurs.
Tu ne penses qu’à une chose : tourner le coin de la rue, pour voir si, là-bas, l’asphalte est plus beau.
Vous imaginez, être jeune aujourd’hui ?
Chaque fois que j’y pense, chaque fois que je pense à la jeunesse que mes enfants vivent, les larmes me montent aux yeux.
Karim est parti, tout seul dans son studio, entouré de sa musique, pensant peut-être aux folles soirées qu’il passait sur scène devant une salle bondée, des gens partout, de la jeunesse à ras bord...
Comme le chante Taktika dans Désarmé jusqu’aux dents :
« Parfois la vie nous malmène, nous laisse pas de répit
T’as l’impression qu’il n’y a pas d’issue, que le ciel est toujours gris
Pourtant il existe des solutions, à toi de choisir laquelle
Demande de l’aide, 1-866-Appelle »