Richard Martineau Dimanche, 24 mai 2020 05:00 : Alors qu’un peu partout le monde se déconfine tout en appréhendant une possible (plusieurs disent : certaine)
deuxième vague à l’automne, la majorité des citoyens — de la Russie à l’Italie en passant par la France, les États-Unis et le Québec — se posent la même question.
https://www.journaldemontreal.com/2020/05/24/avons-nous-fait-les-bons-choix
Avons-nous fait les bons choix ?
Aurions-nous dû confiner tout le monde plus tôt ? Aurions-nous dû faire comme en Suède ? Aurions-nous dû rendre le masque obligatoire ? Effectuer davantage de tests de dépistage ? Confiner seulement les gens atteints ? Les personnes plus vulnérables ? Ne pas imposer la distanciation sociale aux enfants ? Laisser les commerces ouverts ? Les fermer plus tôt ?
Avons-nous pris les bonnes décisions ou nous sommes-nous trompés ?
L’aventure du Poséidon
Tout ça me rappelle le film L’aventure du Poséidon.
Vous vous rappelez ?
L’un des meilleurs films catastrophes des années 1970, ce long métrage (qui met en vedette Gene Hackman et Shelley Winters, et que j’ai dû voir trois fois la même semaine lorsqu’il est sorti en 1972) raconte les aventures d’un groupe de passagers d’un immense bateau de croisière qui tentent de sauver leur peau après qu’une gigantesque lame de fond eut viré leur navire à l’envers.
Guidés par un révérend iconoclaste qui affirme que les êtres humains doivent prendre leur destin en main plutôt que d’attendre que Dieu les sauve, ces individus disparates décident de traverser le bateau et de remonter jusqu’à la poupe au lieu d’attendre patiemment l’arrivée de secouristes.
Leur périple est éprouvant. Certains meurent noyés, d’autres brûlés.
Mais à la fin, ils se rendent compte que leur décision était la bonne, car ils sont les seuls passagers à avoir survécu.
Du film au livre
Le film de Ronald Neame est excellent. Mais le livre de Paul Gallico qu’il adapte est encore meilleur.
Car la fin est plus ambiguë, plus ambivalente.
Les passagers qui ont décidé de suivre le révérend réussissent à sortir du bateau par la poupe, comme on le voit dans le film, mais ils se rendent compte qu’ils ne sont pas les seuls à avoir sauvé leur peau !
D’autres passagers aussi ont été secourus ! Plusieurs autres !
Alors ils se demandent : avons-nous pris la bonne décision lorsque nous avons choisi de traverser le bateau de bas en haut (ou plutôt : de haut en bas) ?
Aurions-nous dû attendre les secours, comme les autres ? Qui sait : si nous avions décidé de ne pas suivre le révérend, peut-être que nos amis qui sont morts en chemin seraient encore en vie ?
Les personnages ne trouvent jamais de réponse à leur question... Et le livre se termine sur cette cruelle interrogation.
« On aurait dû... »
C’est exactement ce qui nous arrive.
Tous les gouvernements se demandent : avons-nous fait les bons choix ? Si c’était à recommencer, ferions-nous la même chose ? Aurions-nous dû faire ceci ? Cela ? Ne pas faire telle chose ou telle autre ? Imiter la Suède ? Ou est-ce la Suède qui aurait dû nous imiter ?
On ne le sait pas. Et le pire, c’est qu’on ne le saura peut-être jamais.
Il faut vivre avec nos décisions, sans savoir si c’étaient les bonnes...