Richard Martineau Jeudi, 2 avril 2020 05:00 - C’est la question que se posent toutes les figures d’autorité lorsqu’arrive une crise.
https://www.journaldemontreal.com/2020/04/02/rassurer-ou-donner-lheure-juste
On rassure la population, quitte à lui cacher certaines informations cruciales, ou on fait preuve de transparence et on lui donne l’heure juste, quitte à créer une panique ?
LA DOUCHE FROIDE
Le gouvernement Legault a choisi la première solution.
Rassurer la population coûte que coûte.
Sauf que cette stratégie ne peut durer qu’un moment.
Lorsque la crise se corse et que tu t’apprêtes à frapper le mur, comme c’est maintenant le cas, tu n’as plus le choix : tu dois regarder les citoyens dans le blanc des yeux et leur dire la vérité.
Aussi désagréable soit-elle.
C’est ce qu’a fait François Legault mardi, en annonçant que les travailleurs de la santé du Québec manqueront de masques, de gants et de blouses d’ici trois à sept jours.
C’est ce qu’on appelle en bon français « une douche froide ».
Car « manque de matériel » veut dire « manque de protection », donc une plus grande vulnérabilité pour nos fameux « anges gardiens ».
Or, combien de ces « anges » décideront de rester chez eux au lieu de mettre leur santé (et surtout celle de leurs proches) en danger, jour après jour après jour ?
C’est bien beau, la vocation et le serment d’Hippocrate, mais ce n’est pas un pacte de suicide non plus...
Le hic avec la douche froide que nous a administrée François Legault en début de semaine est qu’elle arrive après une longue série de douches chaudes.
On ne nous avait pas préparés à ça.
Pendant des jours, c’était « Pas de problème, tout va bien, on a la situation bien en main, fiez-vous à papa François ! »
Puis mardi, à 13 h, patatrac ! On va manquer de masques...
Le choc fut, c’est le moins qu’on puisse dire, brutal.
PAS DES ENFANTS
Pas besoin d’être un génie pour deviner que ça fait déjà quelque temps que notre trio de choc savait qu’on allait manquer de masques, de gants et de blouses.
Ils n’ont pas appris ça quelques minutes avant d’aller en ondes !
Pourquoi ne pas nous l’avoir dit plus tôt, alors ? Comme m’a écrit un ami Facebook, nous ne sommes pas des enfants, nous sommes capables d’encaisser les mauvaises nouvelles comme d’accueillir les bonnes.
N’avions-nous pas le droit d’avoir l’heure juste ? J’ai montré ce commentaire à un confrère de QUB. Sa réponse est intéressante. « À quoi cela nous aurait servi de connaître cette information ? Ça nous aurait donné quoi de savoir ça ? Nous, ce que nous devons faire, c’est de respecter les consignes de sécurité – le confinement, la distanciation sociale, se laver les mains, etc. Nous n’avons aucun pouvoir sur le reste... » Pour mon ami, tout ce que cela aurait donné, c’est d’augmenter le niveau d’inquiétude de la population. Population qui est déjà assez inquiète, merci. Pas besoin d’en rajouter...
PAS UN CHOIX FACILE
Alors, on rassure ou on donne l’heure juste ?
Un peu des deux, j’imagine...
Tant du côté des politiciens que des journalistes, il faut informer la population... sans l’alarmer outre mesure.
Entre l’eau trop chaude et l’eau trop froide, l’équilibre n’est pas toujours facile à trouver. Et j’imagine que le gouvernement a ses raisons d’avoir agi ainsi. Raisons que nous connaîtrons sans doute plus tard.