Une société de plus en plus morcelée - Richard Martineau

Richard Martineau Mardi, 7 décembre 2021 05:00 - Je suis allé m’acheter du dentifrice, l’autre jour. 

https://www.journaldemontreal.com/2021/12/07/une-societe-de-plus-en-plus-morcelee

Une activité en apparence simple. À la portée du premier venu. 

Or, j’ai failli y passer ma journée. 

L’EMBARRAS DU CHOIX

En fait, j’ai fait quelque chose que je n’aurais pas dû faire. 

Au lieu de prendre la première marque qui me tombe sous la main (après tout, un dentifrice est un dentifrice, bâtard), je me suis mis à vouloir « choisir » mon dentifrice.

Un conseil : ne faites jamais ça. 

Pas si vous êtes pressés. 

Il y a des dentifrices qui réduisent la sensibilité dentaire, des dentifrices qui aident à protéger l’émail contre les acides, des dentifrices pour ceux qui éprouvent des problèmes de gencives, des dentifrices qui protègent des caries du collet...

Des dentifrices qui blanchissent les dents, des dentifrices qui offrent une protection naturelle des dents de lait, des dentifrices antibactériens, des dentifrices qui préviennent la formation de tartre...

Des dentifrices pour les dents lisses, contre la parodontite, contre la sécheresse buccale, contre l’inflammation gingivale, pour les fumeurs, contre l’érosion dentaire, pour une meilleure flore buccale...

Des dentifrices homéopathiques, à base de plantes, bios, au mastic, au fluorure de calcium, avec oxygène actif, au sel marin, au charbon, au fluor...

Et même un dentifrice avec des réflecteurs naturels de lumière !

Je n’avais jamais autant songé à mes dents. Après 20 minutes, j’étais tellement lavé que j’ai dû aller m’acheter des aspirines...

Il y en avait contre les rhumes, contre la fièvre, contre les maux de tête, contre les écoulements nasaux, etc. 

CHACUN SUR SON ÎLE

L’autre jour, dans le magazine Marianne, le philosophe français Marcel Gauchet écrivait qu’il n’existait plus de « grande société ».

« On tend de plus en plus à se fabriquer une “petite société” à l’intérieur de la grande, avec des gens qu’on se choisit individuellement, tandis que la vie sociale consiste normalement à vivre avec des gens qu’on ne choisit pas. 

Pour un grand nombre de gens, la vraie vie sociale se déroule désormais en dehors de la “grande société” dont il s’agit juste de réduire les désagréments au maximum. »

Bref, notre société ressemble de plus en plus au rayon de dentifrices de ma pharmacie. 

Il n’y a plus de grand tout. Juste un paquet de petites niches. 

En France, on appelle ça l’archipellisation de la société. 

De petits îlots, les uns à côté des autres...

Même les grands partis politiques ont de la difficulté à empêcher leurs différentes factions de s’entredéchirer.

Regardez ce qui se passe à QS ou au Parti conservateur...

DES SYNDICATS CONTRE L’INTÉRÊT COLLECTIF

La société québécoise a longtemps été « tricotée serrée ».

Mais même chez nous, les mailles qui composent notre tissu social ont tendance à se relâcher. 

On joue de plus en plus au solitaire tout le monde en même temps, pour paraphraser Louis-Jean Cormier. 

Regardez ce qui s’est passé pendant la pandémie. Des syndicats de travailleurs de la santé ont préféré défendre « le droit » de leurs membres à travailler sans être vaccinés plutôt que penser à l’intérêt collectif !

Même si cela menaçait la santé des malades qu’ils ont pour mission de soigner et de protéger !

L’archipellisation nous menace, les amis...

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