Josée Legault - Devant une CAQ indétrônable, pour s’en distinguer, les partis d’opposition s’agglutinent rapidement dans le même coin « progressiste » de l’arène.
Le regard inquiet et rivé sur le scrutin du 3 octobre 2022, les partis d’opposition sont à définir leurs offres politiques respectives. Face à une CAQ indétrônable et une pandémie qui les a éclipsés, leur course pour le 2e rang est bel et bien lancée.
Les chefs du PLQ, de Québec solidaire et du PQ ont chacun profité de la fin de semaine pour attirer les caméras. Chacun aurait d’ailleurs pu reprendre la formule légendaire de Jacques Parizeau qui – alors chef de l’opposition en 1989 et se voyant délaissé par les médias – avait lancé : « J’existe, moi aussi !».
Devant une CAQ indétrônable, pour s’en distinguer, les partis d’opposition s’agglutinent surtout rapidement dans le même coin « progressiste » de l’arène.
En quête du vote francophone perdu, la cheffe libérale Dominique Anglade repositionne son parti. Dans l’ère post-Couillard-Barrette, elle dit le vouloir « progressiste », « environnementaliste » et « nationaliste ». Du moins, juste assez pour ne pas effrayer sa fidèle base anglophone et allophone.
Au PQ, dont le déclin s’accentue depuis 20 ans, le chef Paul St-Pierre Plamondon réinvente son parti. Dans son cas, en le ramenant in extremis à ses premiers amours : défense du français et souveraineté.
Son candidat dans Marie-Victorin, l’ex-député du NPD Pierre Nantel, est une belle prise. Il ne sauvera pas le PQ de son sort, mais dans ce comté qu’il connaît de fond en comble, il mènera tout au moins un combat honorable.
Le match Legault-GND
Qu’à cela ne tienne, le premier ministre François Legault a identifié son adversaire : QS et son chef parlementaire Gabriel Nadeau-Dubois (GND). Celui-là même qu’il a traité de « woke ». Dans l’air du temps, c’est le nouveau hochet servant à discréditer un adversaire.
Or, s’il vise QS, woke ou pas, c’est avant tout parce qu’il ne lui pose aucune menace dans l’isoloir. En cela, le choix de M. Legault est habile, mais facile.
Habile lui aussi, GND cherche à recentrer son parti identifié comme nichant à gauche de la gauche. Pour tenter d’élargir sa base immédiate, il en arrondit les coins jugés maintenant trop carrés.
La souveraineté est balayée sous le tapis. Sur la laïcité, au lieu de condamner la loi 21, il en promet une nouvelle « vision » à venir. Pour séduire la classe moyenne, il brandit la semaine de travail de 4 jours.
L’idée, en soi, est en effet bonne. En 2003, le premier ministre Bernard Landry faisait déjà la même promesse. Moqueur, le chef libéral Jean Charest lui avait rétorqué qu’il le ferait sûrement dans la semaine des 4 jeudis...
À force de se réinventer...
Sur le front urgent des changements climatiques, les trois partis d’opposition se livrent également à une surenchère soutenue.
Bref, les électeurs auront droit à trois partis d’opposition se présentant comme progressistes et écologistes.
Quant au nationalisme dit identitaire, chacun le déclinera à sa manière. En passant par le bleu pâle libéral, il ira du bleu foncé péquiste au bleu délavé des solidaires.
Pour les trois partis, à force de se recentrer à des fins essentiellement électoralistes, le risque de perdre en authenticité est toutefois réel.
Auquel cas, combien de Québécois leur préféreront encore l’ADN politique stable et familier de la CAQ ?
Au fédéral comme au Québec, les tentatives de « recentrage » préélectoral ont d’ailleurs rarement été de grandes réussites. Parlez-en entre autres à Erin O’Toole, Thomas Mulcair ou même, jadis, à un certain Pierre-Marc Johnson...