La violence contre la démocratie - Mathieu Bock-Côté

Mathieu Bock-Côté Mercredi, 3 juin 2020 05:00 - Dimanche soir, à la suite de la manifestation montréalaise en soutien aux Noirs américains

, des casseurs ont semé la pagaille, en pillant des commerces.

https://www.journaldemontreal.com/2020/06/03/la-violence-contre-la-democratie

Apparemment, selon certains, il aurait mieux valu ne pas en parler, ou n’en parler qu’un peu, comme si rien d’essentiel ne se passait là.

C’est faire une erreur d’analyse. Car les casseurs ne sont pas que des casseurs. S’ils attirent assurément avec eux de jeunes personnes en manque de sensations fortes, leur violence a néanmoins une signification politique.

Casseurs

On le voit aux États-Unis.

Toute manifestation porte en elle la possibilité d’un débordement. C’est à partir de ce constat que l’extrême-gauche radicale a élaboré sa stratégie.

Elle rêve d’une révolution violente, mais se sait incapable de la provoquer par elle-même. Elle entend alors instrumentaliser les crises sociales pour les radicaliser et les porter à leur point d’incandescence. Elle cherche à exciter les colères.

Les circonstances actuelles lui semblent idéales.

Les tensions raciales traversent l’histoire des États-Unis et ont été ravivées par l’assassinat de George Floyd.

Dès lors, l’extrême-gauche radicale cherche à polariser la société encore plus, pour multiplier les affrontements violents, en créant une situation telle que tout le pays s’embraserait. Elle rêve d’atteindre un point de non-retour en propulsant la société dans la logique de la guerre civile.

L’extrême-gauche radicale, pour qui la violence est une forme de pédagogie moralement supérieure, est un danger pour la démocratie. Elle peut corrompre les causes les plus nobles en les détournant au service de ses fantasmes.

Nul ne conteste la légitimité des griefs des Noirs américains. De l’esclavage à la ségrégation, ils ont subi une domination dont ils peinent encore aujourd’hui à se relever. Le racisme représente le péché originel de l’histoire américaine. Il pèse encore dans la société actuelle.

Mais il ne faut pas oublier que le grand homme de la cause noire américaine, Martin Luther King, était un adepte de la non-violence et qu’il a su convertir une juste colère en mouvement social pacifique.

Martin Luther King savait une chose : la démocratie est frustrante, elle ne fonctionne pas aussi vite qu’on le souhaiterait, mais elle donne de vrais résultats. La situation des Noirs américains demeure insatisfaisante, mais elle a néanmoins progressé considérablement depuis 50 ans. Il n’y a pas de circonstances atténuantes pour justifier les émeutes et le pillage.

MLK

Martin Luther King, ajoutons-le, rêvait non pas d’une société où chacun se replierait dans sa couleur de peau, mais où cette dernière ne compterait plus.

La politique n’est pas toujours paisible. Elle exprime des tensions sociales qui, toujours, peuvent dégénérer. De ce point de vue, il faut éviter que des mouvements radicaux, hantés par le fantasme de la violence rédemptrice, ne prennent en otage la collectivité.

J’ajouterais qu’en démocratie, il faut toujours se rappeler qu’aucun courant social n’a le monopole du cœur, de l’humanisme ou de la justice. Il faut éviter de transformer ses adversaires en ennemis. En ce moment, c’est pourtant la pente de l’affrontement que certains radicaux veulent faire dévaler aux États-Unis.

Avec un homme aussi erratique que Donald Trump à la Maison-Blanche, qui n’aime rien tant que jouer du muscle présidentiel, la situation pourrait se dégrader très rapidement. En fait, elle est déjà critique.

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