Denise Bombardier Mardi, 14 janvier 2020 05:00 - Avant de rendre l’âme, Benoît XVI, le plus intellectuel et le plus conservateur des papes de notre époque, lance un cri d’alarme.
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Il cosigne avec son ami très cher, le cardinal Sarah, archevêque de Conakry en Guinée, un ouvrage qui est un cri d’alarme en faveur du célibat des prêtres.
C’est aussi un pavé dans la mare pour le pape François, qui, favorable cependant au célibat des prêtres, serait prêt à accepter des hommes mariés âgés compte tenu de la baisse de candidats à la prêtrise.
Le Figaro a publié hier des extraits du livre. « Sans le renoncement aux biens matériels, il ne saurait y avoir de sacerdoce », peut-on y lire. Or l’argumentaire, aussi intellectuellement élevé soit-il, confirme l’exclusion des femmes. Sans surprise, notre cardinal Ouellet est intervenu publiquement pour soutenir Benoît XVI, car le prélat québécois est l’un des plus conservateurs au Vatican.
Identification
L’Église catholique n’a plus de pouvoir au Québec. Sa position sur la place des femmes en son sein nous oblige à nous interroger sur les femmes québécoises qui s’identifient encore à l’institution.
Pour avoir côtoyé ces admirables religieuses au fil des décennies, des femmes, désormais âgées, qui assument leur féminisme et qui ont consacré leur vie à l’éducation des filles, aux soins des malades et à la protection des victimes de violence conjugale, souvent pauvres et démunies, je m’explique mal qu’elles n’aient pas quitté cette Église qui les considère comme des âmes de second rang.
Bien sûr, la foi a justifié leur choix de vie. Mais l’Église est une institution qui est demeurée entre les mains d’hommes de pouvoir souvent plus que de foi, d’hommes qui ont camouflé les exactions sexuelles de plusieurs d’entre eux, en particulier celles des pédophiles. Et les religieuses se sont mises à leur service et leur ont servi de bonnes à tout faire ou de secrétaires dans le meilleur de cas alors qu’elles auraient pu occuper des postes importants dans la hiérarchie ecclésiale.
Incohérence
À cet égard, le cardinal Sarah écrit ceci : « Le célibat sacerdotal est une libération. Il permet au prêtre de s’établir en toute cohérence dans son identité d’époux de l’Église ». Quel prestige ! alors que les femmes, elles, depuis des siècles sont les « servantes du Seigneur ».
L’œuvre du pape et du cardinal donne l’impression que leur combat pour le célibat des prêtres et leur opposition à l’ordination des hommes mariés reposent plutôt sur le refus des relations sexuelles entre époux. « L’ordination des hommes mariés », écrit le cardinal « [...] est une brèche, une blessure dans la cohérence du sacerdoce ».
La sortie du livre fait la manchette dans plusieurs journaux européens alors qu’elle n’a occupé que quelques lignes dans Le Journal. C’est dire l’indifférence du Québec face à l’Église catholique. Or, on compte 1,3 milliard de catholiques sur la terre. Il est impossible donc d’ignorer l’influence du Vatican dans le monde. Sa position rétrograde pèse aussi sur l’Occident. Le combat pour l’émancipation des femmes, la contraception et l’avortement est loin, hélas ! d’être terminé.